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Les nouveaux croyants : une identité en construction

Depuis quelques décennies, nous sommes témoins de profonds changements dans le paysage religieux de notre pays. Parmi eux, nous constatons que nos églises se vident. Il faudrait plutôt dire que nos cultes du dimanche se vident. Et non seulement dans les milieux urbains mais aussi à la campagne, bastion habituel de la religion traditionnel. Mais il faut souligner que si nos églises se vident, cela ne signifie pas que la religion a perdu son importance dans notre société, bien au contraire, de plus en plus de personnes sont à la recherche d’un sens spirituel à leur vie. Mais pour le trouver, ils ne font plus appel à la religion traditionnelle.


Comment expliquer ce phénomène ?

Il fait partie peut être d’un phénomène plus large de transformation des identités sociales. De même que notre façon actuelle de concevoir la vie de couple et l’organisation de la famille ont changé, les pratiques et les convictions religieuses se sont aussi transformées.

Dans le passé,

l’identité religieuse faisait partie d’un héritage culturel commun. Prenons par exemple les rapports entre catholiques et protestantes en Alsace. On était protestant ou catholique par naissance et on le restait jusqu’à la mort. On vivait dans des villages catholiques ou protestants, on se mariait avec une personne de la même confession. Même si ses convictions religieuses étaient plus ou moins solides. Il s’agissait de rester fidèle à la famille, au passé, à la tradition, et on avait du mal à imaginer que quelqu’un puisse changer de confession, de la même manière qu’on ne changeait pas de village, ni de profession.

Aujourd’hui,

nous vivons une situation totalement différente. Tout change. Des citadins s’installent à la campagne et des enfants de la campagne partent étudier en ville. Et presque toujours ils y restent… Personne ne peut plus dire qu’il n’aura jamais besoin de changer de métier ou d’activité. De plus en plus de personnes sont en « formation permanente » pour s’adapter aux nouvelles technologies, qui se déploient partout dans le monde du travail. Et cela va du cadre commercial à l’agriculteur, qui a dû aussi se mettre à l’informatique, présente même dans nos fermes. Tout évolue très rapidement.

A cela, il faut ajouter un croissant individualisme. Nos contemporains ont du mal à se reconnaître comme faisant partie d’une communauté, d’une église avec des dogmes, des valeurs et des pratiques définies depuis longtemps. L’identité n’est plus une affaire d’une communauté, d’un groupe, mais c’est une affaire individuelle.

Chacun de nous doit construire son identité. Il ne s’agit plus de rester fidèle au passé mais de se forger un avenir. Et pour cette construction identitaire, l’individu doit se « débrouiller » dans une certaine solitude. Dans une démarche personnelle où des éléments de provenance très différente vont être assemblées, essayés, assimilés ou abandonnés. Toute affirmation dogmatique ne sera plus à accepter mais à intégrer dans un corps de convictions préexistantes et toute définition identitaire devra passer par l’épreuve de l’expérience. Il s’agit de faire un chemin, un parcours, qui permet à l’individu de se connaitre et de se construire. Mais cette construction sera par définition toujours provisoire, instable, inachevé. De même que nous parlons de plus en plus de familles « recomposées », l’identité religieuse est aussi recomposée, en mélangeant des éléments de traditions et de contextes différents. Pensons par exemple aux chrétiens qui pratiquent la méditation ou le yoga, qui participent au culte du dimanche mais qui s’intéressent aussi au bouddhisme ou à la pensée juive. Il s’agit de construire une identité religieuse à la carte. A la dimension et selon l’attente flou de l’individu, et marquée par les transformations vertigineuses de notre société.

Cette donne sociale inédite est un important défi pour nos églises. Nous devrons chercher à nous adapter à cette nouvelle situation au risque de tout simplement disparaitre. Mais comment tenir compte de tous ses changements en restant fidèles aux valeurs de l’Evangile? Certains croient qu’on doit résister aux changements, qu’il s’agit de renouer avec la tradition pour chercher à reconquérir un espace perdu, de revenir en quelque sorte au passé. Je pense au contraire qu’il faudra se montrer très créatif pour pouvoir imaginer un avenir différent pour nos églises. Il faudra sûrement laisser de côté certaines habitudes et traditions qui n’ont plus de sens et sont appelées à mourir tôt ou tard, et peut être avoir aussi le courage de concevoir des nouvelles formes de parler, de penser et d’agir pour se mettre en dialogue avec les hommes et les femmes de notre temps.

Il s’agit finalement de faire ce que l’Eglise a toujours fait,

en s’adaptant aux différents contextes qui ont accompagné son histoire pour que l’Évangile puisse continuer à donner du sens à nos existences et nous approcher de Celui qui nous a promis une vie abondante.



Pasteur Walter TECHERA



 


 
             

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